Les festivals de l’été – Orange : retour triomphal de Samson et Dalila sur la scène des Chorégies
Crédit photos : © Philippe Gromelle
43 ans ! 43 ans que le public des Chorégies d’Orange attendait de revoir cet opéra grandiose dans le décor sublime du Théâtre Antique ! Et, merveilleuse coïncidence, on célèbre cette année le centième anniversaire de la disparition de Camille Saint-Saëns. Le directeur Jean-Louis Grinda a sélectionné une distribution de très grande qualité pour marquer cet événement et tous les éléments sont rassemblés pour vivre une soirée exceptionnelle.
L’Orchestre Philharmonique de Radio-France placé sous la baguette de Yves Abel est à la hauteur de sa réputation parmi les meilleurs orchestres européens. Saluons particulièrement les solos du hautbois et du cor anglais exécutés avec puissance et sensibilité, aux sonorités parfaites.
Le ballet, alliant les ballets de l’Opéra-théâtre de Metz Métropole et de l’Opéra Grand Avignon, fut un véritable régal pour les yeux, apportant une touche d’exotisme et de couleur avec une chorégraphie dynamique et envoûtante à la fois, signée Eugénie Andrin.
Les chœurs, particulièrement présents et importants dans cet ouvrage étaient assurés pour la circonstance par l’association des chœurs de l’Opéra de Monte-Carlo et de l’Opéra Grand Avignon. La puissance qui se dégage de leurs interventions n’a d’égale que la subtilité de leur interprétation.
Mettre en scène Samson et Dalila est un véritable défi car l’ouvrage est assez statique et présente peu d’action. C’est sans doute la raison pour laquelle il est souvent donné en version de concert. Cependant, Jean-Louis Grinda nous offre un spectacle grandiose aux effets de masse impressionnants, alternant avec l’intimité des scènes entre Samson et Dalila, ou encore la symbolique de l’étoile de David matérialisée par des sangles qui enlacent Samson. La solitude de Samson prisonnier est accentuée par le gigantisme des chaînes qui l’entravent descendant du haut des colonnes du théâtre. La projection finale montrant le temple qui s’effondre sur les Philistins marque la victoire de Dieu sur les païens et la rédemption de Samson.
Les jeux de lumières sur le mur de scène du théâtre antique sont féériques et plongent le spectateur dans un univers qui souligne la puissance divine à l’œuvre face à la vanité des hommes.
Côté chanteurs, tous les rôles sont tenus par des artistes à la diction parfaite servant à la perfection le livret de Ferdinand Lemaire. Nicolas Cavallier campe un Grand Prêtre impressionnant soutenu par les trois Philistins interprétés par Christophe Berry, Marc Larcher et Frédéric Caton. Le vieillard hébreu est joué par Nicolas Courjal très à l’aise dans le rôle et Julien Véronèse est un Abimélech convaincant malgré la brièveté du rôle.
La voix veloutée de Marie-Nicole Lemieux sert à merveille le personnage de Dalila, ambigu et cruel même si son jeu de scène manquait un peu de sensualité dans le duo avec Samson. Les airs sont interprétés avec conviction et les aigus sont poignants malgré une attaque un peu dure.
Enfin, Roberto Alagna, en très grande forme, incarne un Samson tout en nuances, à la fois héroïque et sûr de la puissance de son Dieu incarné par un ange-enfant aux ailes lumineuses qui le guide au premier acte, galvanisant les Hébreux et les incitant à se libérer du joug des Philistins, et plein de doutes dès qu’apparaît Dalila, son talon d’Achille, jusqu’au sacrifice final où il retrouve sa force perdue pour détruire les ennemis des Hébreux. La voix est à son firmament, au medium puissant et plein, aux aigus larges jusqu’à ce contre-ut final magnifique qui clôt l’ouvrage et laisse le spectateur ébahi et émerveillé. Un frisson parcourt le public avant que ne se déclenche un tonnerre d’applaudissements. Du grand, du très grand Alagna !
Alors ne ratez pas la diffusion de ce spectacle sur France 5 le 16 juillet, précédé à 20h50 d’un documentaire sur Roberto Alagna.
Samson Roberto Alagna
Le Grand Prêtre de Dagon Nicolas Cavallier
Abimélech Julien Véronèse
Un messager philistin Christophe Berry
Un vieillard hébreu Nicolas Courjal
Le Premier Philistin Frédéric Caton
Dalila Marie-Nicole Lemieux
Orchestre Philharmonique de Radio-France, Chœur de l’Opéra de Monte-Carlo, Chœur de l’Opéra Grand Avignon, dir. Yves Abel
Ballet de l’Opéra-théâtre de Metz Métropole, Ballet de l’Opéra Grand Avignon, chorégraphie Eugénie Andrin
Mise en scène Jean-Louis Grinda
Costumes Agostino ARRIVABENE
Lumières Laurent Castaingt
Samson et Dalila
Opéra en trois actes de Camille Saint-Saëns, livret de Ferdinand Lemaire, créé le 2 décembre 1877 au Hoftheater de Weimar.
Représentation du mercredi 7 juillet 2021, au Théâtre Antique d’Orange.