Crédit photos : © Émilie Brouchon
L'elisir d'amore à Bastille : les débuts de Pene Pati à l'Opéra de Paris
Une seconde distribution de L’ELISIR D’AMORE que justifie surtout la présence de Pene Pati et du maestro Ambrogio Maestri
Facteur sympathie
Certains souvenirs ne nous rajeunissent pas… mais il est vrai que, pour avoir assisté à l’une des représentations de L’elisir d’amore au Palais Garnier en février 1987, à chaque fois qu’il nous arrive d’entendre une exécution de l’œuvre, après les quelques notes du coretto introductif, c’est toujours le timbre solaire de Luciano Pavarotti qui s’impose à nos oreilles : « Quanto è bella, quanto è cara! » Ainsi les ténors qui ont suivi nous ont-ils régulièrement laissé quelque peu sur notre faim quant à l’ampleur de la ligne et à la clarté de la diction. Cela est moins vrai pour l’interprétation de Pene Pati dont le Nemorino s’impose d’emblée par une projection hors pair et par une aisance scénique qui faisait sans doute défaut à son illustre devancier : un facteur sympathie, s’installe dès les premières scènes et ne quitte plus l’incarnation de ce jeune artiste. Il est Nemorino de bout en bout et cela fonctionne parfaitement, la magie de l’opéra aidant probablement aussi. Cependant cela n’était malheureusement pas le cas avec Matthew Polenzani dont la présence, vraisemblablement plus facile à gérer que celle de son collègue, ne parvenait jamais à s’imposer tout à fait dans la première distribution de cette reprise de la production de Laurent Pelly.
Tenorissimo
D’ailleurs, peut-on vraiment parler de seconde distribution, la nouveauté de ces représentations reposant essentiellement sur la présence de Pene Pati et, sans jeu de mots, du maestro Ambrogio Maestri ? Initialement annoncée pour l’ensemble de la programmation, Sydney Mancasola a été remplacée pour quatre dates par Mané Galoyan, Pretty Yende et Aleksandra Kurzak. Le soir de la première nous avions avancé quelques réserves au sujet de son Adina ; elles ne semblent pas se démentir au fil du temps. Le décalage avec Nemorino est alors flagrant pendant le premier duo de l’acte I où Pene Pati nous livre un cantabile tout en finesse « Chiedi al rio perché gemente », réplique à un « Chiedi all’aura lusinghiera » de routine. Même si la situation s’améliore quelque peu dans le deuxième duo, l’allegretto convenant visiblement mieux à la fusion de voix trop inégales.
D’un finale I très incisif (larghetto « Adina, credimi, te ne scongiuro… »), en passant par un duo avec son rival mené sur une ligne magistrale, le ténor samoan aboutit à la romanza de l’acte II qu’il vit dans sa propre interprétation scénique, dépassant vraisemblablement les indications de la mise en scène, du moins lorsqu’on compare son jeu à celui des collègues qui l’ont précédé ; l’interprétation vocale en tire d’autant plus bénéfice, grâce à un crescendo se parachevant dans un pianissimo de haut vol, lui réservant, à juste titre, l’ovation d’un public en délire.
Espérant revoir bientôt ce chanteur très prometteur sur les scènes de l’Opéra national de Paris, émettons néanmoins le souhait qu’on lui propose d’autres rôles que les personnages bouffes dans lesquels on pourrait malencontreusement le cantonner. Il a déjà à son répertoire le Duc de Mantoue (Rigoletto), Alfredo (La traviata), le Roméo de Gounod. Osons parier qu’il serait sans doute un excellent Edgardo (Lucia di Lammermoor), voire un Arturo d’envergure (I puritani).
Maestrissimo
Ambrogio Maestri est chez lui dans cette mise en scène pour avoir participé à la création, au printemps 2006, pour ses débuts dans la maison et dans l’œuvre, et pour l’avoir reprise à la fin de l’été 2007 et à l’automne 2015. Il connaît aussi sur le bout des doigts son Dulcamara qu’il a ensuite chanté dans le monde entier (Vienne, Munich, Milan, New York, Barcelone, Londres). C’est ainsi qu’il en impose par l’autorité de l’accent dès les premières notes de sa cavatine, « Udite, udite, o rustici ». Et il est tout aussi mémorable dans l’épisode de chant dans le chant de l’acte II, la barcarole à deux voix avec Adina, et désopilant dans le finale II, notamment par ses mimiques cocasses. La complicité qui s’instaure avec Pene Pati lors du premier duo est par ailleurs inénarrable sur les plans à la fois scénique et vocal.
Simone Del Savio et Lucrezia Drei sont égaux à eux-mêmes dans les rôles respectifs de Belcore et de Giannetta.
Direction toujours alerte de Giampaolo Bisanti. Une mention particulière pour les chœurs de l’Opéra national de Paris qui, dans cette production, constituent quelque peu l’âme de l’action, malgré un petit problème de justesse à l’acte I.
Adina : Sydney Mancasola
Nemorino : Pane Pati
Belcore : Simone Del Savio
Il Dottor Dulcamara : Ambrogio Maestri
Giannetta : Lucrezia Drei
Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris, dir. Giampaolo Bisanti
Mise en scène : Laurent Pelly
L’elisir d’amore
Melodramma giocoso en deux actes de Gaetano Donizetti, livret de Felice Romani d’après le livret de Scribe pour Le Philtre d’Auber, créé au Teatro alla Cannobiana de Milan le 12 mai 1832.
Représentation du samedi 30 octobre 2021, Paris, Opéra Bastille
1 commentaire
Da questo scritto si evince, ancora una volta, che l’opera lirica vuole « voci » altrimenti, la noia, prende il sopravvento a tutto lo spettacolo! Possiamo vedere produzioni con grandi apparati scenografici o, come di moda adesso, con regie astruse in nome di un ringiovanimento dell’opera che, però, è solo il mascheramento di una mancanza: ci sono poche – voci – che possano essere chiamate tali!
Spero presto di avere il piacere di ascoltare, e vedere questo giovane tenore. a cui faccio di cuore tanti Toi Toi Toi e, naturalmente, tanti complimenti al grande Maestri che, più volte, ho avuto il piacere di ascoltare!!