Que c’est rafraîchissant ! Samedi 14 janvier 2023 avait lieu la première de cette nouvelle compagnie, PiccolOpera, qui donnait une version de Cosi fan tutte de Mozart superbement remaniée.
Donner des opéras dans des formats plus réduits (2h au lieu de 3h30), avec un petit effectif (un quatuor à cordes pour tout orchestre), voilà l’âme de cette compagnie.
Le spectacle qu’elle nous a proposé samedi soir, la performance que cela représentait, étaient semés d’embûches. Arriver à adapter le livret de Da Ponte, la musique de Mozart, le tout sans renier ni l’un ni l’autre, tout en le modernisant, contournant les difficultés sans jamais dénaturer les textes originaux mais en les rendant plus attractifs, plus ludiques que jamais, c’est le pari qui a été fait, et c’est celui qui a été tenu. Par la mise en scène d’Anne-Marie Mosser, une réécriture des récitatifs en français et modernisés, Cosi a pris un sacré coup de jeune !
Les chanteurs y sont aussi pour beaucoup. Malgré un jeu scénique qui dans l’ensemble reste encore perfectible, (ce serait d’ailleurs le seul reproche que l’on pourrait faire), leur énergie, leur enthousiasme, et leur grande qualité vocale nous font oublier que l’opéra que l’on écoute n’est accompagné que par un quatuor et que l’œuvre a été tronquée d’un bon tiers. Il faut préciser que ce sont tous de jeunes chanteurs, tout juste sortis du conservatoire pour certains. Cependant la prestation qu’ils nous ont livrée n’a rien à envier à certaines grandes productions que l’on peut voir dans les grandes institutions habituelles.
Nous avons notamment pu entendre une Despina, espiègle et parfaitement incarnée tant vocalement que sur le plan scénique par Faustine Picco. Il est particulièrement difficile de rester en retrait tout en laissant les autres briller quand la musique et le jeu l’imposent puis de remplir toute la scène lorsque c’est son tour. Pourtant Faustine Picco maîtrise ces nuances à la perfection avec sa magnifique voix de soprano qui s’accorde parfaitement avec la musique de Mozart.
Alexandre Artemenko est vocalement idéal pour le rôle et campe un Guglielmo charismatique. Un jeune baryton très intéressant. Nous avions eu l’occasion de le découvrir il y a quelques mois lors d’un récital : quelle joie de constater que les espoirs fondés en lui à cette époque se confirment ce soir, à l’opéra, dans si joli rôle !
Une Dorabella qui, à l’instar de Despina, a su comprendre parfaitement tous les enjeux de son personnage, incarné par la mezzo-soprano Camille Le Bail. Outre sa grande qualité vocale, cette jeune mezzo nous a présenté une Dorabella fantasque et avant-gardiste, sans jamais tomber dans la vulgarité ou la démagogie que l’on voit si souvent dans ce rôle. D’une grande élégance avec une voix magnifique, que demander de mieux !
Retenez bien ces noms, il ne serait pas étonnant que vous les croisiez à nouveau dans des programmes bien plus ambitieux d’ici peu, et vous pourriez alors vous targuer de connaître avant tout le monde la pépite montante de l’opéra français.
Les autres chanteurs (Servane Brochard en Fiodiligi, Ambroise Divaret en Ferrando, Fabien Galvier en Don Alfonso) n’étaient pas en reste et l’on a pu constater, pour le plus grand plaisir d’un public conquis, toute la complicité qui animait chacun des artistes. Ce spectacle a bien plus que comblé nos attentes et il nous tarde d’en voir plus !
Enfin je voudrais souligner particulièrement le travail extraordinaire du quatuor qui a accompagné seul l’intégralité de l’œuvre, avec une justesse et une précision redoutable. Les quatre musiciens n’ont jamais flanché malgré la fatigue, faisant preuve d’une endurance et d’une qualité technique et musicale parfaite, dirigée de main, ou devrais-je dire plutôt d’archet de maître par Marius Mosser, premier violon et directeur musical du projet.
Un immense bravo à cette jeune compagnie qui commence sur les chapeaux de roues ! Ce spectacle nous semble idéal pour faire découvrir le monde de l’opéra au jeune public mais aussi à des publics éloignés des grandes maisons d’opéra. La formule très légère tant au niveau de la composition de la troupe, de la mise en scène, de la durée, rend particulièrement accessible ce très beau spectacle à tous les budgets. La nature de sa mise en scène en fait un opéra très souple qui s’adapte à toutes les salles. N’hésitez pas à les contacter pour tout renseignement ou questions !
Fiordiligi : Servane Brochard
Coordinatrice artistique & Dorabella : Camille Le Bail
Ferrando : Ambroise Divaret
Gulgielmo : Alexandre Artemenko
Direction artistique & Despina : Faustine Picco
Don Alfonso : Fabien Galvier
Quatuor à cordes :
Direction musicale & Violon 1 : Marius Mosser
Violon 2 : Gabriele Slizyte
Alto : Pauline Le Toullec
Violoncelle : Marc-Antoine Novel
Mise en scène : Anne-Marie Jenny Mosser
Chef de chant : Benjamin Terris
Così fan tutte
D’après l’opera buffa en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Lorenzo da Ponte, créé le 26 janvier 1790 au Burgtheater de Vienne.
Représentation du samedi 14 janvier 2023, Verneuil-en-Halatte
1 commentaire
Pour une première, c’était une véritable réussite et de plus très accessible aux néophytes