LA GIOCONDA au San Carlo de Naples : une affiche des (très) grands soirs !

Grande fête vocale au San Carlo de Naples, avec trois des plus grands chanteurs lyriques du moment affichés dans La Gioconda de Ponchielli.

Même s’ils sont personæ non gratæ en Italie – du moins auprès de Giorgia Meloni et de son gouvernement –, le moins que l’on puisse dire, c’est que les deux Français Stéphane Lissner et Dominique Meyer créent l’événement en convoquant dans leurs théâtres respectifs, dans une même production, trois des plus fameux gosiers du moment : Anna Netrebko, Jonas Kaufmann et Ludovic Tézier. Il faudra attendre l’ouverture de la prochaine saison de la Scala pour entendre ce trio de choc dans La forza del destino à Milan, mais pour l’heure, ce sont les Napolitains qui peuvent les applaudir dans La Gioconda, un opéra qui semble décidément retrouver les faveurs des programmateurs et du public.

Romain Gilbert (à retrouver en interview sur Première Loge !), qui signe une mise en scène d’une belle noirceur, prend ce mélodrame au sérieux, parvient à conférer aux personnages une réelle épaisseur et propose quelques scènes très fortes, tel le dernier tableau prenant place sur un plateau dévasté, avec l’étonnante danse lascive à laquelle s’adonne l’héroïne éponyme. Il n’oublie pas, enfin, que le titre de l’œuvre de Hugo dont s’inspire Arrigo Boito pour son livret est Angelo, tyran de Padoue : de fait, le « tyran », comme dans le récent spectacle proposé par Olivier Py à Bruxelles puis à Toulouse, est bien ici le personnage principal du drame… d’autant qu’il est ce soir incarné par un Ludovic Tézier grandiose de style et de puissance dramatique. Quel soutien vocal, quelle ligne de chant, quelles couleurs… Tézier, ou l’art d’incarner le salaud le plus abject sans jamais se départir de la plus parfaite musicalité ! 

À ses côtés, on trouve un Jonas Kaufmann en très bonne forme : voix italienne ou pas ? Sans revenir sur ce débat quelque peu stérile, observons que le ténor, sans être tout à fait le spinto requis par le rôle, est en très bonne forme et soigne son chant sans jamais donner dans l’histrionisme auquel cèdent parfois certains de ses collègues dans ce type de répertoire. Son « Cielo e mar », particulièrement raffiné, est une vraie réussite.

Anna Netrebko est ce soir dans une forme éblouissante : la voix est longue, garde sa densité et la variété de ses nuances sur l’ensemble de la tessiture, la projection est impériale, le dramatisme saisissant : une superbe performance, d’autant que la soprano s’implique comme rarement dans son personnage.

Face à tel trio, le reste de la distribution ne démérite pas. Les moyens d’ Eve-Maud Hubeaux sont peut-être un peu légers pour Laura, surtout dans son affrontement avec l’héroïne éponyme ; mais la mezzo, qui remplace Anita Rachvelishvili initialement prévue, fait entendre un chant probe et se montre parfaitement engagée. Belles prestations également de Kseniia Nikolaieva (la Cieca), d’ Alexander Köpeczi (Alvise) et surtout de l’orchestre et du chœur du San Carlo, en très belle forme sous la baguette absolument électrisante de Pinchas Steinberg, pleine d’intensité et toujours attentive au plateau. Une grande soirée lyrique !

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Retrouvez Ludovic Tézier en interview ici, Eve-Maud Hubeaux ici, et Romain Gilbert !

Les artistes

La Gioconda : Anna Netrebko
Enzo Grimaldo : Jonas Kaufmann
Barnaba : Ludovic Tézier
Laura Adorno : Eve Maud Hubeaux
Alvise Badoèro : Alexander Köpeczi
La Cieca : Kseniia Nikolaieva
Zuàne / Un cantore / Un pilota : Lorenzo Mazzucchelli
Isèpo : Roberto Covatta
Un barnabotto : Giuseppe Todisco

Orchestre, Chœur (dir. Fabrizio Cassi ) et Ballet (dir. Clotilde Vayer ) du Teatro di San Carlo, avec la participation du « Coro di Voci Bianche » (dir. Stefania Rinaldi ) du Teatro di San Carlo, dir. Pinchas Steinberg.

Mise en scène : Romain Gilbert
Décors : Etienne Pluss
Costumes : Christian Lacroix
Lumières : Valerio Tiberi
Chorégraphie : Vincent Chaillet

Le programme

Titre de l’opéra ou du spectacle

Opéra en xxx actes de Xxxx, livret de Xxxx d’après Xxxx, créé à Xxxx en XXXX

Xxxxx (lieu de la représentation), représentation du XXXX (date)