Un concert donné au Negresco en présence de différents consuls (© D.R.)
Organisé par la Consule Générale d’Italie à Nice, Madame Catherine Gioiella, le récital de la soprano Angela Papale accompagnée au piano par le Maestro Fabio Marra commémorait les cent ans de la naissance de la Callas.
Dans un programme entièrement consacré aux grandes arias du répertoire italien, Angela Papale et Fabio Marra ont ravi l’auditoire du Salon Masséna, richement orné, au sein de l’emblématique hôtel du Négresco à Nice. Le spectacle, intitulé l’Opera italiana, Maria Callas per sempre donnait d’emblée le ton.
Après le discours de présentation de la Consule, le premier air entonné par la cantatrice est l’air d’Amélie dans Un Bal masqué de Verdi. Vêtue d’une robe verte soyeuse agrémentée de taffetas, Angela Papale s’avance sur scène dans les couleurs de l’Italie. Quelques instants avant de commencer le récital, elle s’adosse au piano et dès le début du chant elle paraît transfigurée. Elle semble investir de tout son être le personnage qu’elle incarne. L’effet est saisissant. Véritable soprano dramatique, elle adopte la douleur, exprime le lamento de ses rôles en se donnant tout entière, comme s’il en allait de sa vie.
Captivée par son propre chant qui la transcende, la cantatrice fait preuve d’une technique vocale exceptionnelle et d’une personnalité singulière. Les arias de Verdi sont très charnelles, son goût la porte davantage vers les arias de Puccini qui nous emportent, nous ravissent. Ce fameux compositeur est d’ailleurs prépondérant dans les airs proposés, d’abord avec Senza Mamma de Suor Angelica, puis avec Un bel di vedremo de Madame Butterfly, et enfin à travers deux romances : Solo e amore puis Morire ?
Dans un arrangement élégant de la partition d’orchestre pour le piano par le Maestro Fabio Marra, laissant à la voix tout l’espace nécessaire à son déploiement – et dans la chaude atmosphère générée par l’utilisation de la pédale, Angela Papale fait retentir sa voix ronde et assurée.
© D.R.
Elle paraît véritablement habitée par la musique et les différentes héroïnes majeures qu’elle incarne, avec une physionomie exprimant au mieux le désespoir. La chanteuse accentue par ailleurs certaines consonnes avec une force tragique, ce qui permet de donner aux voyelles une ampleur considérable. Le jeu un peu ralenti des airs augmente la dimension dramatique des situations. La couleur de voix sombre de la soprano nous plonge dans la dramaturgie de chaque opéra, dans le destin de chaque figure, comme on l’entend dans Roberto Devereux de Donizetti avec « Quel sangue versato ».
Digne représentante du lyrisme romantique, Angela Papale donne à la musique une dimension agonistique impressionnante et s’en explique de la manière suivante : « Mon chant est une épée » dit-elle. Le manche est en elle et par sa voix elle en fait sortir la lame pour battre le fer de l’acoustique. Selon sa représentation de son art, deux forces entrent en tension dans le miracle du chant : d’un côté la force pure, brutale, puissante, de l’autre la douceur, la nuance, la subtilité. Entre les deux, la troisième force, le chant, se fraie un chemin, surgit dans cette tension, trouve le juste milieu entre les deux forces antagonistes.
Dans « La mamma morta » d’Andrea Chénier de U. Giordano, les nuances pianissimi que la cantatrice réalise avec un soutien puissant témoignent du maintien de sa couleur vocale mélodramatique à travers les contrastes et l’intensité des sons.
Lors des romances finales, notamment celles de F.P. Tosti, Se tu non torni, Malia, ou encore Baciami! , le chant se fait à la fois plus dynamique et badin. Le pianiste et la cantatrice, complices et investis dans l’expression mélodramatique des arias se sont montrés indéfectiblement engagés pour la préservation de la musique romantique et ont été ovationnés. Dès lors, un bis est proposé : l’une des romances tipicamente italiane composées à la terrasse d’un café – selon la légende- grâce à la collaboration fructueuse entre le poète Gabriel d’Annunzio et F.P. Tosti à la Belle époque. Badineries, puissance envoûtante et glissandi espiègles sont alors de mise.
Le récital d’Angela Papale accompagnée par Fabio Marra dans le merveilleux écrin du Négresco est l’occasion de redécouvrir des maestros tels que U. Giordano, P. Mascagni avec l’air de Suzel dans L’Amico Fritz ou encore F.P. Tosti, dont les œuvres sont hélas trop peu jouées en France. Le 26 avril les artistes internationaux se produiront à Cracovie en Pologne, avant de partir pour Porto et rejoindre Talinn pour un autre récital le 18 juillet, chanté au fil de l’épée.
La soprano et le pianiste, après le récital (© D.R.)
Angela Papale, soprano
Fabio Marra, piano
Airs et mélodies de Donizetti, Verdi, Giordano, Puccini, Mascagni, Tosti.
Nice, le Negresco, concert du 18 avril 2023.
1 commentaire
Je connais la valeur artistique et interprétative d’Angela et Fabio, réaffirmée dans ce récital au Negresco. Magnifique événement !