Molière et les musiciens de comédies-ballets : une réjouissante musicothérapie ! (1/2)
Chaque 15 janvier, la Comédie-Française célèbre l’anniversaire du « patron ». L’année qui commémore les 400 ans de sa naissance (15 janvier 1622) s’avère particulièrement faste pour ses comédies-ballets. Spectacle total, chacune d’entre elles invente une manière de « coudre ensemble » les composantes de comédie, ballet et musique. Un ménage à trois plutôt opérant …
Pour donner du plaisir …
En 2022 comme au temps de Molière, Lully et Beauchamps (maître baladin), il s’agit de dynamiser le lien entre comédie, musique et chorégraphie que ces trois acolytes imaginaient fortuitement lors de leur impromptu collaboratif, Les Fâcheux (1661). A compter de ce succès étourdissant, la comédie-ballet devient un jalon incontournable de l’histoire théâtrale, prise entre le ballet de cour, rituel monarchique depuis Henri IV, et la tragédie lyrique à naître avec Lully (1673). Pour chacun de ses concepteurs, ce nouveau genre est sans doute un laboratoire fructueux. Sa dramaturgie s’arcboute sur le goût français du Grand Siècle : se divertir avec comédie et musique, danser comme tous les gentilhommes, dont le jeune monarque Louis XIV. Sur les 29 pièces que Molière signe de 1658 à 1673, douze d’entre elles mêlent la musique et la danse, à l’instar de la troupe rivale à l’Hôtel de Bourgogne, celle de la Comédie-Italienne. Si l’Arlecchino ou le Scaramuccia des Italiens sont comédiens-acrobates-chanteurs-instrumentistes aguerris, Molière est à l’occasion chanteur basse-taille au sein de sa troupe.
Louis XIV en Apollon dans Le Ballet royal de la Nuit (1653)
Y-at-il une recette dramatique pour ce genre hybride de la comédie-ballet, tantôt comique, tantôt déréalisée, tantôt stylisée sur les canons mythologiques ? Selon Molière, pragmatique, sa seule règle consisterait à procurer du plaisir au spectateur-auditeur. Ainsi, dans le prologue de L’Amour médecin (1665), la Comédie, la Musique et le Ballet chantent :
« Unissons-nous tous trois d’une ardeur sans seconde / Pour donner du plaisir au plus grand roi du monde ! »
Au gré des intrigues et du temps imparti, les intermèdes chantés et/ou dansés sont soit judicieusement intégrés à la comédie (Le Bourgeois gentilhomme), soit lestement cousus (L’Amour médecin, conçu et répété en 5 jours !) et même chahutés au fil des actes du Malade imaginaire. Ces divertissements forment parfois un contrepoint qui humanise la noirceur de l’intrigue, telle la pastorale (bergers et bergères) arrimée à la comédie réaliste de Georges Dandin. Vous avez probablement lu le compte rendu de sa représentation à l’Opéra royal de Versailles (janvier 2022), sous la plume de notre confrère Cartouche.
À suivre…