Dans notre nouvelle ère de marasme sanitaire, social, économique et culturel, comment continuer à se divertir dans notre confinement? Orphelin.e du spectacle vivant, comment se soigner ? Hors des circuits quotidiens de BFMTV et du télé-travail, y-a-t-il des pistes divertissantes pour écouter, lire, se connecter ? Sans doute Première Loge pourrait vous en soumettre une par semaine pour patienter. Voire faire une cure printanière de résilience …
Écouter … les récents CD de Karine Deshayes, artiste lyrique ex aequo des « Victoires de la musique 2020 » : Une amoureuse flamme (Klarthe Records, K064) ainsi que les Fables de La Fontaine d’Offenbach (Alpha Classics). Le premier offre la quintessence des épanchements féminins à l’opéra romantique français, de Halévy jusqu’à Massenet, en compagnie de l’excellent Orchestre Victor Hugo sous la direction de J.-F. Verdier. Le second allège notre tendance au spleen grâce à la pétulance offenbachienne, appliquée aux piquantes situations d’une sélection des Fables (Orchestre de l’Opéra de Rouen-Normandie dirigé par J.-P. Haeck). Dans ces volte-face successives, la mezzo-soprano excelle à capter chaque mini-portrait, alternant raffinement et humour facétieux, legato voluptueux et aigus étincelants. Chaque récital creuse le sillon des riches heures du XIXe siècle français. Nous en percevons d’autant mieux l’attrait que la prononciation de Karine Deshayes est exemplaire et riche en sous-entendus subtils : comme au THEATRE !
Lire … ce que propose un critique musical après un autre séisme que la pandémie, soit les journées révolutionnaires de juin 1848 (sous la IIe République) :
« Librement et fraternellement, je puis également vous proposer une simple question, moins encore pour m’éclairer personnellement que pour connaître le degré d’instruction où vous êtes vous-même aujourd’hui parvenu sur ces matières. Voici ma question : que pensez-vous de l’art musical en Europe au commencement de la présente année [1848 … ou 2020 …], autrement dit de l’état où il se trouvait quand il est mort ? … Vous n’êtes pas un érudit, prétendez-vous ; ceci est une fin de non-recevoir. Il faut bien que vous vous soyez formé une opinion telle quelle sur ce sujet, puisqu’il vous intéresse directorialement. […] je veux seulement savoir vers quel point de l’Europe musicale vous vous seriez tourné de préférence, il y a six mois, pour chercher de bons compositeurs et de bons interprètes pour leurs ouvrages ; car enfin vous ne pouvez vous passer ni des uns ni des autres. C’est une triste nécessité dont vous sentez tout le poids, je n’en doute pas, mais c’est une nécessité que vous devez subir quelque temps encore, rien n’est plus évident. Dites, seriez-vous allé au nord, au sud, à l’est, à l’ouest ; auriez-vous exploré l’Italie, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Espagne, ou la France ou Paris tout bonnement ? » (Hector Berlioz, « Ouverture du Théâtre de la Nation », Journal des débats, 26 juillet 1848).
Se connecter … https://www.free-scores.com/partition?p=a1NkxyHiPZ
Amalia Ramirez Lupion dans Los Diamantes del la Corona
Pour celles et ceux qui lisent les partitions, démystifions [au moins le nom du] le coronavirus en jouant ou chantant le boléro Los Diamantes del la Corona de Francisco Barbieri. Cet arrangement d’une danse de sa zarzuela au titre homonyme (Madrid, 1854) est plaisant. L’œuvre lyrique du compositeur espagnol témoigne de la porosité des frontières (comme les virus) : elle s’inspire du livret à succès d’E. Scribe pour l’opéra-comique de D. F. E. Auber, Les Diamants de la couronne (Paris, 1841).