Pianoforte Pleyel 1858 Richard Barker
Riens
12 pièces pour piano de Gioachino Rossini, extraites des Péchés de vieillesse
1CD Illiria, enregistré le 7 décembre 2018 (2020)
Le pianiste Richard Barker nous offre un programme Rossini « sans voix » : douze des vingt-quatre « Riens » composés par le Cygne de Pesaro alors qu’il n’écrivait plus pour l’opéra, délicieusement interprétés sur un Pianoforte Pleyel de 1858.
Les qualités de pianiste de pianiste de Richard Barker ne sont plus à démontrer (il s’est formé d’abord au King’s School Worcester puis au Conservatoire Giuseppe Verdi de Milan, s’est produit dans de nombreuses villes européennes mais aussi aux USA ou à Shanghai, et a enseigné au Centre de formation lyrique de l’Opéra National de Paris, à la University of Cincinnati Ohio et à l’Accademia del Maggio Musicale Fiorentino). Quant à sa grande connaissance du chant et des compositeurs lyriques, il l’a acquise en travaillant de nombreuses années à la Scala mais aussi à la Fenice, au Maggio Musicale, à Pesaro ou encore à Vienne.
Les récents et très réussis CD Bellini et Rossini gravés avec Maxim Mironov (toujours pour Illiria) nous ont déjà donné un bel aperçu de son talent, qui se confirme ici dans un album Rossini « sans voix », lequel révèle ses affinités avec l’esprit et le style du compositeur, léger et touchant, faussement simple, plein de finesse, de sensibilité et d’autodérision. La virtuosité de Richard Barker, réelle, n’est jamais démonstrative mais toujours expressive et empreinte de sensibilité. Le pianiste se plie par ailleurs avec une grande aisance à l’extrême variété des formes et des styles, certains « Riens » s’apparentant à des danses traditionnelles (une mazurka, une sicilienne) quand tel autre (le 6e) évoque l’art ancien du contrepoint, ou que d’autres, encore, sonnent comme un hommage à Schumann ou Chopin.
Les belles sonorités d’un pianoforte contemporain de Rossini (Pleyel 1858) achèvent de nous faire voyager dans le temps et de nous plonger dans l’ambiance d’une soirée donnée par le maître de Pesaro dans sa maison de Passy, aux côtés de son épouse Olympe Pélissier, alors que Rossini avait quitté l’agitation des salles d’opéra depuis déjà quelque 30 ans.
Car les « Riens » proposés ici par Richard Barker (il s’agit de la première série de 12 « Riens » extraits du volume XII des Péchés de vieillesse) participent bien de cette musique composée par Rossini à son rythme, sans contrainte d’aucune sorte – en tout cas pas celle de devoir plaire au public ni de se plier aux attentes des spectateurs de telle ou telle ville d’Europe) –, sans aucun délai à respecter pour la remise de la partition. Et si cette musique était, finalement, l’une des plus sincères et des plus personnelles qui soient sorties de la plume du Cygne de Pesaro ? Le grand soin accordé à la composition de ces pages, tel que décrit par Luca Ciammarughi dans l’intéressante notice du CD, semble prouver que ces pièces étaient sans doute, pour Rossini, bien plus que de simples bagatelles…
Quoi qu’il en soit, voici une très belle occasion de (re)découvrir ces 12 premiers « Riens » (ici débarrassés des sous-titres évocateurs que leur avait ajoutés Heugel)… en attendant un second album avec les 12 derniers « Riens », que laisse augurer l’indication « Part I » figurant sur la pochette du CD.