LA CLÉMENCE DE TITUS, Mozart (1791) – dossier
Opera seria en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Caterino Mazzolà, d’après Metastasio, créé le 06 septembre 1791 au Théâtre des États (Prague).
L’ŒUVRE
Le compositeur
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Mozart est non seulement un compositeur majeur de l’histoire de la musique, mais aussi sans aucun doute l’un des génies les plus étonnants de l’histoire de l’art : pour sa précocité (virtuose du clavier et du piano, il entreprend dès 6 ans une tournée européenne ; il compose son premier ouvrage lyrique, Die Schuldigkeit des ersten Gebotes, à l’âge de 11 ans); la diversité extrême de son talent (il composa avec un talent égal dans absolument tous les genres musicaux : musique sacrée, musique de chambre, musique symphonique, opéra, mélodies, …) ;
et surtout, le ton très personnel de ses œuvres, qui se caractérisent tout à la fois par une apparente simplicité, une forme de limpidité ou d’harmonie sereine, mais aussi une profondeur de sentiment souvent exceptionnelle. Dans le genre lyrique, Mozart laisse quelques-uns des plus grands chefs-d’œuvre de l’opéra : Les Noces de Figaro (1786), Cosi fan tutte (1790), Don Giovanni (1788)… Son génie s’illustra aussi bien dans la comédie (La Finta Giardiniera, Les Noces de Figaro) que dans l’opéra pastoral (Ascanio in Alba), l’opera seria (Lucio Silla, Mithridate, Idoménée, La Clémence de Titus) ou le singspiel (Zaide, L’Enlèvement au sérail, La Flûte enchantée).
Le librettiste
Caterino Mazzolà
Caterino Tommaso Mazzolà (1745-1806) est un poète et librettiste italien d’origine vénitienne. Poète de la cour de Dresde jusqu’en 1796, il travaille notamment avec Da Ponte et Salieri. En 1796, il rentre à Venise et s’engage dans des activités diplomatiques.
Il meurt dans cette ville en 1806. Ses livrets les plus célèbres sont ceux de La Clémence de Titus (d’après un livret précédent signé Métastase pour un opéra d’Antonio Caldara créé en 1734) et du Turc en Italie, opéra de Franz Seydelmann qui inspirera celui de Rossini quelques années plus tard (l’œuvre de Rossini sera créée en 1814).
La création
La Clémence de Titus fut créée le 6 septembre 1791 à Prague, au Théâtre des États (voir ci-contre). Le rôle de l’empereur était incarné par le ténor Antonio Baglioni (créateur de Don Ottavio dans Don Giovanni) ; Maria Marchetti-Fantozzi chantait Vitellia, et le rôle de Sesto était tenu par un castrat : Domenico Bedini. Il s’agissait d’une commande officielle, l’œuvre étant destinée à célébrer le couronnement de Léopold II, roi de Bohême.
Le livret
Il s’agit de l’adaptation d’un livret que Métastase écrivit à l’origine pour le compositeur Caladara, et qui avait déjà été réutilisé plusieurs dizaines de fois par d’autres musiciens.
ACTE I
Vitellia aime l’empereur Titus : elle espère l’épouser et devenir ainsi impératrice. Mais elle apprend que l’Empereur souhaite épouser Bérénice. Elle va alors utiliser son soupirant Sextus pour se venger : elle charge le jeune homme de fomenter un complot contre Titus… Mais Titus a renoncé à Bérénice : il porte son choix sur la jeune Servilia. Hélas, Servilia (sœur de Sextus) est déjà amoureuse du jeune Annius : elle repousse les avances de l’Empereur, lequel décide alors de prendre Vitellia pour femme. Malheureusement, l’attentat ordonné par cette dernière prend forme grâce au dévouement de Sextus: le Capitole est incendié ; Titus, cependant, échappe à la mort.
Titus (sesterce)
ACTE II
L’Empereur apprend tous les détails du complot. Sextus doit-il se dénoncer, comme le lui recommande Annius? Doit-il s’enfuir, comme le lui conseille Vitellia ? Arrêté, le jeune homme est confronté à l’Empereur et condamné à mort. Dévorée par la culpabilité, Vitellia avoue son crime à Titus, lequel, magnanime, finit par accorder son pardon à tous les conjurés.
La partition
Que l’œuvre ait été composée en même temps que La Flûte enchantée est on peut plus révélateur du génie protéiforme de Mozart : le ton de cet opera seria est grave, solennel – certains disent un peu froid : le fait qu’il s’agisse d’une œuvre de circonstance empêche sans doute parfois le compositeur de rendre les personnages aussi crédibles et émouvants que ceux de la trilogie de Da Ponte. Pourtant l’œuvre, certes un peu inégale, comporte de grandes beautés : le duo Annio/Servilia du premier acte, le finale du premier acte, d’un dramatisme impressionnant, l’air de Servilia « S’altro che lagrime », le trio du second acte entre Vitellia, Publius (le capitaine de la garde) et Sextus, et surtout deux airs majeurs : le rondo de Sesto « Parto, parto », avec clarinette obligée, et celui, grandiose, que chante Vitellia (avec accompagnement de cor de basset) avant son revirement : « Non più di fiori ».
https://www.youtube.com/watch?v=vAMHz9yUY4E
Sesto : « Parto, parto » par Elina Garanca (Karel Mark Chichon)
Vitellia : « Non più di fiori » par Julia Varady (John Eliot Gardiner)
Pour écouter l’œuvre
CD
Krenn, Casula, Berganza / Wiener Philharmoniker, Chorus – Wiener Staatsoper, dir. Kertész. DECCA, 1967.
Burrows, Baker, Minton / Orchestre et choeurs de Covent Garden, dir. Colin Davis. Philips, 1976.
Schreier, Varady, Berganza / Dresdner Staatskapelle, Chorus – Leipziger Rundfunkchor, dir. Karl Böhm. DG, 1978.
Rolfe-Johnson, Varady, Von Otter / English Baroque Soloists, Chorus – Monteverdi Choir, dir. John Eliot Gardiner. Archiv, 1990.
Langridge, Popp, Murray / Chœurs et orchestre de l’Opéra de Zurich, dir. Nikolaus Harnoncourt. Teldec, 1993.
Padmore, Pendachanska, Fink / Freiburger Barockorchester, RIAS Kammerchor, dir. René Jacobs. Harmonia Mundi, 2005.
Allemano, Bernsteiner, Aldrich / Chœur et Orchestre de l’Accademia Montis Regalis, dir. Alessandro De Marchi, 2014 (version 1804).
Pour voir et écouter l’œuvre
Streamings
Levine – Ponnelle / Tappy, Neblett, Troyanos. Vienne, 1980.
Davis – McVicar / Kunde, Giannattasio, Connolly. Aix-en-Provence, 2011 (sous-titres en français)
DVD et Blu-rays
Tappy, Neblett, Troyanos / Wiener Staatsopernchor und Philharmoniker, dir. Levine ; mise en scène : Ponnelle. DG, 2006 (capté en 1989).
Prégardien, Naglestad, Graham / Choeurs et orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. Sylvain Cambreling ; mise en scène : Herrmann. Opus Arte, 2005.
Schade, Röschmann, Kasarova / Wienerstaatsopernchor und Philharmoniker, dir. Nikolaus Harnoncourt ; mise en scène : Kušej. Arthaus, 2012 (capté en 2003).
Dahlberg, Soldh, Poulson / Choeurs et orchestre du Drottningholm Court Theatre, dir. Arnold Östman. Arthaus, 2012 (capté en 1987).
Dossier réalisé par Stéphane Lelièvre