C’est toujours un grand plaisir que de rencontrer Adriana González : pas diva pour deux sous, je retrouve la soprano dans le petit café/restaurant où les chanteurs se produisant à Bastille ont leurs habitudes. Visiblement, Adriana, accueillie on ne peut plus chaleureusement par le patron et les serveurs, y est connue et appréciée !
Ancienne élève de l’Académie de l’Opéra, Adriana revient cette année à l’Opéra de Paris par la grande porte, puisqu’elle s’apprête à y chanter Micaëla (les 30 novembre et 03 décembre) dans le spectacle de Calixto Bieito. Un rôle qui « tombe » particulièrement bien dans sa belle voix de soprano lyrique, et qu’on lui demande maintenant un peu partout : elle a chanté (ou chantera) également Micaëla à Genève, Amsterdam, Toulon, Barcelone,…
Otto Edelmann Competition, 2016
Mais Adriana González est également une puccinienne d’exception : sa Mimi, que nous avons découverte à Toulon en février 2022, est selon nous l’une des plus bouleversantes qu’on puisse entendre aujourd’hui : croisons les doigts pour que d’autres théâtres hexagonaux lui proposent ce rôle !
Quand on lui fait remarquer que sa voix ample, souple, richement colorée et que l’émotion qui se dégage de ses interprétations devraient servir au mieux les œuvres de Puccini, Adriana González esquisse un sourire et confirme sa volonté d’explorer plus avant les héroïnes de ce répertoire : « Un projet devrait se faire en 2024, avec mes débuts dans un rôle particulièrement émouvant… même s’il est encore un peu tôt pour en dire plus ! La Rondine ou Edgar seraient également possibles, mais ce sont des œuvres qu’on donne trop peu souvent… ».
Et Butterfly ? « Oui bien sûr ! Mais… dans quelques années seulement ! Je viens de refuser ce rôle qu’un théâtre italien m’a proposé : je ne suis pas encore prête, ce ne serait pas prudent. Le rôle est écrasant : le nombre de chanteuses aguerries l’ayant refusé – ou ne l’ayant chanté qu’au disque – n’est pas négligeable, c’est un signe ! »
Si Adriana est de plus en plus demandée, et dans le monde entier (sa carrière dépasse maintenant les frontières européennes : elle a chanté récemment aux États-Unis, notamment Roméo et Juliette à Houston aux côtés de Michael Spyres, ou encore le Requiem de Verdi à Dallas sous la direction de Fabio Luisi), elle n’en garde pas moins la tête sur les épaules et avance prudemment, sans chercher à précipiter les choses…
Lisbonne, 2022 (dir. Lorenzo Viotti)
Chez Verdi, outre le Requiem, déjà chanté à Lisbonne (sous la direction de Lorenzo Viotti) et à Dallas c’est Amelia de Simon Boccanegra, ou Desdemona d’Otello qu’elle se dit prête à affronter pour l’instant. Les deux Léonore viendront sans doute s’ajouter à son répertoire, mais pas avant quelques années. Et Traviata ? « Comment ne pas rêver du rôle ? Mais là aussi il me faut attendre, et sans doute plus longtemps encore… ». Mais qu’importe, il y a encore tant à chanter d’ici là ! Mozart, notamment, avec bientôt une nouvelle prise de rôle : Fiordiligi. Adriana ne cache pas non plus son désir de chanter de nouveau la Juliette de Gounod, qui lui a valu un magnifique succès à Houston… C’est avec « l’air du poison » qu’elle a remporté Operalia en 2019. « Le rôle, dans son ensemble est difficile : il est long, il faut chanter dans une langue pas si simple pour quelqu’un qui n’est pas français d’origine , il comporte aussi la célèbre valse du premier acte, qui a priori correspondait moins à ma vocalité… Mais grâce au travail effectué avec Patrick Summers, très proche des chanteurs, très rassurant, et grâce aussi à la complicité qui s’est établie avec les partenaires, notamment Michael Spyres qui chantait Roméo, tout s’est très bien passé ! ». Pour voir un aperçu du triomphe remporté par Adriana Gonzalez, voyez ci-dessous :
"Amour, ranime mon courage", Houston Grand Opera
Pour l’heure, l’actualité d’Adriana est discographique, avec un album qu’elle vient d’enregistrer aux côtés de son complice Iñaki Encina Oyón et de sa camarade Marina Viotti. Même si la sortie n’est prévue que dans une petite année, Adriana accepte de nous en dire un peu plus sur le programme : on des y entendra duos qui permettront de découvrir ou de redécouvrir quelques noms un peu oubliés (Charles-Marie Widor, Paul Puget), trois compositrices (Charlotte Devéria, Cécile Chaminade et Pauline Viardot) aux côtés de compositeurs plus familiers : Fauré, Chausson, Debussy, Delibes,…
Così fan tutte, « Prendero quel brunettino », enregistré à Paris en période de Covid, avec Iñaki Encina Oyón au piano.
Iñaki Encina Oyón, Marina Viotti : Adriana aime s’entourer d’artistes qui sont aussi des amis, et les liens qui l’unissent à la mezzo suisse semblent très forts : « Nous aimerions tellement chanter plus souvent ensemble ! Si on nous demandait, par exemple, I Capuleti e i Montecchi de Bellini, nous dirions oui tout de suite ! ».
Avis aux directeurs d’opéras ! …
Pour retrouver Adrina González au disque :